Le blogueur se permet ici un apparté dans la mesure où ce billet ne répond pas au format canonique qu'il s'est fixé. Il s'agit simplement de citer deux extraits de texte qui font échos il me semble à la problématique de ce blog :
The scientist’s urge to investigate, like the faith of the devout or the
inspiration of the artist, is an expression of mankind’s longing for something
fixed, something at rest in the universal whirl: God, Beauty, Truth.
Truth is what the scientist aims at. He finds nothing at rest, nothing
enduring, in the universe. Not everything is knowable, still less is predictable.
But the mind of man is capable of grasping and understanding
at least a part of Creation; amid the flight of phenomena stands the
immutable pole of law.
L'envie du scientifique pour la recherche, comme la foi du dévot ou l'inspiration de l'artiste, est une expression de l'aspiration de l'humanité pour quelque chose d'immuable, quelque chose d'immobile dans le tourbillon universel : Dieu, la Beauté, la Vérité. La vérité est ce que le scientifique vise. Il ne trouve rien d'immobile, rien de durable, dans l'univers. On ne peut pas tout connaître, encore moins tout prévoir. Mais l'esprit de l'homme est capable de saisir et de comprendre au moins une partie de la Création ; au milieu de la fuite des phénomènes se dresse le pôle immuable de la loi.*
Blackie & Son, London, Glasgow, 1935.
(*Traduction du blogueur)
La science et l'art sont deux choses essentiellement humaines. Elles expriment une volonté de voir au-delà du visible. Elles font émerger des visions objectives et subjectives du monde. Bien qu'issues de sources communes - l'observation attentive des choses et la curiosité - elles donnent naissance à des théories différentes à propos du monde, de ce qu'il signifie, de ce que sont les connexions qui le structurent et de ce que nous devrions considérés comme important.
Science et art ont divergé. Tandis que la science affinait sa capacité à expliquer le visible par les lois invisibles de la nature, l'art devenait de plus en plus subjectif, métaphorique, et s'éloignait d'une représentation réaliste. Il explorait d'autres mondes, laissant la science traiter de celui-ci.
John D. Barrow
Actes Sud, 2015
J'invite particulièrement la lectrice ou le lecteur à découvrir, cet été par exemple, le beau et passionnant livre de John Barrow.
Un dernier extrait d'un autre texte plus ancien, plus épistémologique surtout :
Le savant n'étudie pas la nature parce que cela est utile; il l'étudie parce qu'il y prend plaisir et il y prend plaisir parce qu'elle est belle. Si la nature n'était pas belle, elle ne vaudrait pas la peine d'être connue, la vie ne vaudrait pas la peine d'être vécue. Je ne parle pas ici, bien entendu, de cette beauté qui frappe les sens, de la beauté des qualités et des apparences; non que j'en fasse fi, loin de là, mais elle n'a rien à faire avec la science; je veux parler de cette beauté plus intime qui vient de l'ordre harmonieux des parties, et qu'une intelligence pure peut saisir.
Henri Poincaré
(1908)